Le temps s’est suspendu... Pourtant, alors que nous avons ralenti nos rythmes, que des questionnements ont émergé, que nos perspectives se sont renversées, la nature, quant à elle, a pu reprendre son souffle. Cet arrêt sur image, sans rembobinage possible, nous pousse à entendre ce nouveau signal fort qui nous est envoyé.

À l’échelle individuelle, le confinement a été source de difficulté, d'anxiété, de précarité ou d'isolement pour beaucoup d’entre nous. Il fut aussi un moment d’introspection et d’innovation : revenir à l’essentiel, prendre du temps pour soi et ceux qui nous sont proches, se questionner sur nos priorités et créer de nouvelles habitudes. Nombreux sont ceux qui ont fait de cette situation une fabrique à idées pour travailler, se divertir, s’instruire et consommer autrement.

La société entière quant à elle, se prépare aux prémices d’un monde nouveau. Maintenant que le déconfinement progressif suit son cours, quels choix ferons-nous ? Ferons-nous comme « avant » ou, au contraire, serons-nous capables d’entendre ce que les forêts nous disent ?

Les forêts nous protègent. Parce que nous les malmenons, nous en subissons aujourd’hui les conséquences.

Les forêts sont au coeur des enjeux environnementaux, sociaux et économiques qui marqueront notre futur. 1,6 milliards de personnes en dépendent directement pour leur subsistance ; elles concentrent 80% de la biodiversité terrestre, sont un facteur essentiel de régulation du climat, épurent l’eau que nous buvons et l’air que nous respirons. Elles portent également des valeurs émotionnelles, culturelles et sont source de bien-être. Les forêts sont indispensables à la vie.

Pourtant, la crise écologique est bien plus profonde que nous ne le pensons… Les études se suivent et malheureusement se ressemblent. Elles montrent l’importance des dégradations subies par la nature. Ainsi, selon une étude de WWF, près de 60% des animaux sauvages ont disparu depuis 1970[1]. Au total, 1 million d’espèces sont menacées d’extinction[2] et disparaîtront dans les années à venir si nous continuons dans cette impasse.

Les impacts des activités humaines ont des répercussions directes sur notre quotidien. L’agence des Nations Unies pour l’environnement l’a souligné : près de 60% des maladies infectieuses sont d’origine animale ; chiffre qui grimpe à 75% en tenant compte des maladies comme Ébola, Zika, grippe porcine, grippe aviaire et aujourd’hui… le COVID-19. Une étude scientifique de EcoHealth Alliance relayée dans de nombreux médias précise même le lien entre déforestation, dégradation des habitats naturels et émergence des maladies infectieuses[3]. Une autre étude, plus récente, réalisée par La Fondation pour la recherche sur la biodiversité indique qu’ « Il existe ainsi un fort consensus en faveur d’un lien entre déforestation, dans ses différentes dimensions, et multiplication des zoonoses »[4].

Tout se passe comme si, à l’image du chef d’oeuvre de Miyazaki « Princesse Mononoké », à force d’exploiter de façon irraisonnée les forêts, nous en subissions les conséquences. Il est nécessaire à présent d’entendre ce cri qui nous est adressé et d’en tirer les enseignements.

Nous pouvons agir pour les forêts, soyons leur porte-voix.

Tant sur le plan individuel que collectif, nous pouvons être les ambassadeurs des forêts pour répondre aux risques qu'elles encourent et agir par des actions concrètes.

A l’image des objectifs du développement durable (ODD) de l’ONU, nous devons avoir une approche globale : prendre en compte la biodiversité et les habitats naturels, les cours d’eau, les sols, les droits des travailleurs, les droits et coutumes des populations autochtones ; favoriser le développement local ; permettre un dialogue équitable entre les parties prenantes, de meilleures pratiques d’approvisionnement et développer des chaînes de valeur plus courtes sont plus que jamais les enjeux auxquels nous devons répondre.

Les forêts font tellement partie de notre paysage qu’elles en sont presque devenues invisibles. Nous en bénéficions pourtant au quotidien pour nous loger, emballer nos produits, nous meubler, jouer, nous instruire et même nous habiller. Par nos actes de consommation, nous pouvons agir et jouer un rôle déterminant en réclamant des produits issus de pratiques plus responsables.

Des solutions existent. Parmi ces solutions, le label FSC a été mis en place depuis 25 ans grâce au dialogue continu entre ONG, entreprises, syndicats et représentants des populations autochtones afin de réduire les impacts de nos modes de vie sur les forêts et préserver les services fondamentaux qu’elles nous rendent.

Si les crises sont génératrices de transformation et d’innovation, celle que nous vivons nous incite à écouter la voix des forêts et à les défendre en faisant les bons choix. Préserver les forêts constitue non seulement notre geste barrière mais sème également les graines d’un futur désirable.

[1] WWF, Rapport Planète Vivante, 2018.
[2] IPBES, Global Assessment Report on Biodiversity and Ecosystem Services, 2019
[3] Ecohelth Alliance, 2017
[4] FRB, mai 2020.

Les co-signataires de cette tribune

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