À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, FSC France s’est intéressée à une personnalité pionnière dans le domaine du développement durable ; Hélène Valade, riche de plus de vingt années d’expérience au service de la transformation des entreprises, et qui pilote aujourd’hui la stratégie Environnement du Groupe LVMH, engagé avec FSC.

Hélène Valade, LVMH
Gabriel de La Chapelle

Si la prise en compte des enjeux environnementaux par les acteurs économiques français s’est nettement généralisée ces dernières années, cela est en partie dû aux efforts et à la persévérance d’une femme, Hélène Valade, qui a fait de ce sujet son combat dès le début de sa carrière.

Diplômée de Sciences Po Paris, Hélène Valade s’est très vite emparée du sujet de l’environnement et de son lien avec les politiques des entreprises, sujet qu’elle qualifie aujourd’hui comme étant « sa colonne vertébrale ». Ayant débuté au sein de l’IFOP, institut de sondage d’opinion, elle assite en effet aux débuts des critiques de la société de consommation, de la naissance de nouvelles attentes sociétales et de préoccupations environnementales de la part des citoyens. « J’ai commencé à suivre ce sujet avec beaucoup d’intérêt, et créé le premier Observatoire des Français et du développement durable. Mais j’ai eu envie d’agir et d’aller plus loin » explique-t-elle.

Persuadée de la nécessité pour les acteurs économiques de créer des services dédiés au développement durable, un métier naissant à l’époque, Hélène Valade entreprend alors de rencontrer plusieurs grandes entreprises. Elle tombera alors sur la personne qui marquera un tournant pour sa carrière, Gérard Mestrallet, PDF de Suez (aujourd’hui Engie), qui l’embauche en tant que Directrice du développement durable pour la Lyonnaise des eaux, filiale de Suez. « Cette création de poste m’a permis de mettre en place quelque chose de radicalement nouveau, fondé sur une logique de transformation du business, avec toute la difficulté qui était de lier environnement et économie » se souvient Hélène Valade, « Nous étions pionniers dans cette démarche. Ça n’a pas été évident, j’ai dû construire une vraie légitimité et crédibilité et prouver que c’était nécessaire ».

En bonne défenseuse de ses convictions, elle gravit ensuite les échelons, jusqu’à répliquer sa nouvelle fonction pour l’ensemble du groupe Suez en 2013.

En parallèle, elle créé le Collège des directeurs de développement durable (C3D) en 2007, association qui rassemble aujourd’hui plus de 300 adhérents, et dont elle souligne « la belle progression ». La création de ce réseau innovant répond aux besoins d’échanger entre pairs sur le sujet du développement durable, pour lequel « il n’y avait alors pas de mode d’emploi », et ce, dans le but de progresser, sensibiliser, partager ses bonnes pratiques, mais aussi ses difficultés.

Des difficultés, Hélène Valade en aura connu durant son parcours. « Je me suis heurtée à beaucoup de scepticisme concernant le développement durable, à des personnes que l’on qualifiait alors de climatosceptiques » explique-t-elle. « Finalement, tout le monde se démenait à l’époque sur ce sujet, y compris mes homologues masculins, car la matière n’était pas simple. Ces difficultés à me faire comprendre et à faire bouger les lignes n’étaient donc pas liées à ma position de femme, mais bien au sujet que je portais, car il se situait en amont d’un certain nombre de constats – celui de la réalité de l’augmentation des températures, de la prise de conscience des conséquences de la raréfaction de l’eau… Aurait-ce été plus simple si j’avais été un homme ? Je ne pense pas ».

Hélène Valade se félicite aujourd’hui de voir que les choses ont considérablement changé, notamment grâce à des temps forts tels que la COP21 en 2015, et un certain « alignement des planètes » qui s’est formé ces dernières années, avec des règlementations françaises comme la Loi économie circulaire en France (2020), et européennes, avec le pacte vert pour l'Europe, ou « Green Deal » (2019), et autres évolutions législatives à l’international. Les attentes des nouvelles générations participent aussi à cette accélération et cette prise de conscience collective de la nécessité d’agir, assimilée par les entreprises.

À la suite de son mandat de Présidente du C3D, Hélène Valade s’engagera alors dans une autre association, l’Observatoire de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (ORSE), qu’elle préside depuis 2018.

Aujourd’hui Directrice Développement Environnement du Groupe LVMH depuis janvier 2020, elle s’épanouit dans la réalisation de la stratégie environnementale du Groupe et de ses 75 Maisons, pour répondre à des objectifs précis sur le climat, la biodiversité, l’économie circulaire et la traçabilité. « Notre mot d’ordre se résume à la (re)construction d’une relation plus harmonieuse avec la nature » développe Hélène Valade, « Il y a un nouvel équilibre à trouver entre la créativité et la nature, l’une ne devant pas dominer l’autre. Et cela change tout dans notre manière d’aborder le vivant. Il n’y a pas de champagne sans raisins, ni de parfum sans espèces végétales ».

Ce constat se matérialise par des actions concrètes du Groupe, avec des engagements contre la déforestation, une trajectoire carbone, l’éco-conception et la circularité créative, la fin du plastique ou encore l’agriculture régénératrice, sujet qu’Hélène Valade a initié et qu’elle affectionne particulièrement : « Nous avons réussi à enclencher de réelles transformations avec nos partenaires agriculteurs, en réhabilitant par exemple 3 millions d’hectares d’habitats naturels, en passant de la monoculture à la polyculture, avec des impacts forts sur la qualité des sols ».

Boutique Berluti, LVMH
Meraki Com

La traçabilité de l’ensemble des chaînes de valeur du Groupe est aussi un axe fondamental de la politique menée par le leader du luxe, qui se traduit par exemple par l’engagement dans des démarches de certification, comme FSC sur les emballages papier/carton, ou le bois dans le secteur des vins et spiritueux. « Nous sommes très heureux de travailler avec FSC pour certifier ces filières. LVMH a une force d’entraînement de l’ensemble de ses publics très forte, et il faut en profiter pour sensibiliser nos clients à la préservation des forêts. Cela fonctionne encore plus au niveau d’une boutique, qui donne de la visibilité à ce sujet aussi important », explique Hélène Valade, faisant référence à la récente certification FSC de la nouvelle boutique Berluti obtenue fin 2023 dans le Mall of Emirates à Dubaï.

Si elle devait résumer ce qu’elle aime le plus dans son métier, Hélène Valade cite son appétence à « embarquer, convaincre, mobiliser sur des vrais enjeux de transformation », aptitudes qu’elle a renforcées tout au long de son parcours, et qui, associées à une bonne dose de courage, lui ont permis de se faire une place dans le monde du développement durable.

À toutes les femmes qui aimeraient devenir actrices du changement, Hélène Valade leur conseille « d’écouter leurs intuitions, d’être cohérentes avec leurs convictions et leurs valeurs, mais surtout d’avoir de l’audace, pour identifier et lever les freins au changement ». « La vision productiviste issue des 30 Glorieuses se loge partout, il faut accepter de mettre les mains dans les process, et oser s’affirmer pour changer les habitudes ». Pas facile, mais possible, Hélène Valade en est la preuve…